Dans cet épisode de Climate Now, nous rencontrons des chercheurs suédois qui tentent de comprendre pourquoi les niveaux de méthane, un gaz qui réchauffe le climat, augmentent si fortement dans l'atmosphère. S'agirait-il d'une réaction naturelle à une planète plus chaude ?
Dans le sud de la Suède, les scientifiques travaillant à la station de recherche d'Askö enquêtent sur le mystère du méthane. Ils sont inquiets car les niveaux de méthane dans l'atmosphère augmentent rapidement et personne ne sait exactement pourquoi. Cette hausse est une mauvaise nouvelle car ce gaz à effet de serre contribue au réchauffement, et ce alors que, de mois en mois, des records de chaleur sont battus.
Le mois de septembre le plus chaud jamais enregistré
Cela a été de nouveau le cas en septembre 2023, selon les dernières données du Service Copernicus concernant le changement climatique.
À l'échelle mondiale, le mois de septembre a été de loin le plus chaud jamais enregistré, avec des températures supérieures de 0,9°C à la moyenne pour la période 1991-2020.
En Europe, ce mois a battu un record de chaleur, avec une énorme anomalie de température de 2,5°C au-dessus de la moyenne. La France, la Belgique, l'Allemagne, la Pologne et l'Autriche figurent parmi les pays qui ont connu des records mensuels de chaleur sur ce mois.
Il a fait chaud et, dans des régions d'Europe et d'Afrique du Nord, les pluies ont été inhabituelles. La carte des anomalies de précipitations fournie par Copernicus montre en bleu foncé, les fortes pluies associées à la tempête Daniel. Elle a provoqué des inondations dévastatrices et meurtrières en Libye, Grèce, Turquie et Bulgarie.
Dans le même temps, en Antarctique, l'étendue de la glace de mer était inférieure de 9% à la moyenne pour septembre sur la période 1991-2020.
C'est le cinquième mois consécutif où la glace de mer de l'Antarctique atteint un niveau historiquement bas pour cette période de l'année.
D'où vient tout ce méthane ?
Les concentrations de méthane dans l'atmosphère augmentent à l'heure actuelle et ce n'est pas une bonne chose car le méthane est un puissant gaz à effet de serre.
Dans le sud de la Suède, à Askö, nous rencontrons des scientifiques dont la mission consiste à traquer les sources de méthane, un gaz contribuant au réchauffement qui n'a ni couleur ni odeur. Il est émis par une grande diversité de sources naturelles et artificielles et les chercheurs veulent savoir quelle quantité provient de paysages maritimes comme ceux de la Baltique. Ce type d'environnement est rarement surveillé, mais il devrait peut-être l'être.
"Nous avons installé une chambre sur la surface de l'eau de mer pour mesurer le méthane, le CO2 et la vapeur d'eau," nous précise Thea Bisander, doctorante de l'Université de Södertörn à Huddinge, à bord du bateau utilisé par les scientifiques. "Généralement, le méthane provient des fonds marins, mais quels types d'habitats émettent quelles quantités, c'est toute la question," fait-elle remarquer.
Déterminer la quantité de méthane provenant de zones côtières naturelles est une étape petite, mais importante, pour répondre à cette grande question : pourquoi les niveaux de méthane augmentent-ils si fortement ? S'agit-il d'une source naturelle ou d'une source humaine et industrielle ?
"Je pense que c'est l'un des grands problèmes que nous essayons de résoudre actuellement : qu'est-ce qui explique ces évolutions dans la hausse du méthane au fil du temps ?" souligne Volker Brüchert, professeur associé de géochimie à l'Université de Stockholm.
"Traditionnellement, nous pensions que les tropiques et les basses latitudes étaient les principales sources de méthane dans l'atmosphère, mais il existe un certain nombre d'environnements qui partagent de nombreuses caractéristiques et qui se trouvent à des latitudes beaucoup plus élevées, comme c'est le cas ici en Suède," poursuit-il.
Un effet de la nature ?
"Quand on observe ces environnements, on y trouve également des ceintures de végétation très denses, ces eaux deviennent relativement chaudes en été. Elles présentent essentiellement toutes les caractéristiques d'un environnement qui produit également beaucoup de méthane, mais cela n'a pas été pris en compte de manière exhaustive," indique-t-il.
Ce graphique montre comment les niveaux de méthane ont augmenté au cours des 20 dernières années. Ce gaz provient de trois types de sources différentes : le premier tiers, de l'industrie, comme le pétrole et le gaz ; le deuxième, de l'agriculture, notamment de l'élevage, et le dernier, de la nature.
Lequel est responsable de l'augmentation récente du méthane ? Selon le géochimiste Volker Brüchert, nous devons en apprendre plus sur ce qui se passe dans la nature.
"Nous savons que les sources d'émission agricoles, les stations d'épuration sont des émetteurs plus importants que certains de ces systèmes côtiers," explique le scientifique. "Pour autant, nous avons de nombreux littoraux sur Terre qui n'ont pas été suffisamment pris en compte," renchérit-il.
Des bactéries productrices de méthane en cause ?
Les autres zones peu surveillées sont les lacs, rivières, zones humides, terres agricoles et forêts. La nature est complexe, comme l'explique l'expert David Bastviken.
"Cette zone est sèche, l'air pénètre dans le sol de surface, ce qui signifie que des bactéries mangeuses de méthane sont présentes : c'est un puits de méthane," décrit-il en nous montrant une partie du paysage, avant de nous emmener près d'une zone marécageuse, saturée en eau. "Les conditions du sol sont anaérobies," explique-t-il. "Les micro-organismes produisant du méthane en généreront : c'est une source de méthane," dit-il avant de désigner la forêt derrière nous. "Elle a l'air sèche, elle est donc probablement un puits de méthane, mais une forêt humide peut aussi être une source de méthane," précise-t-il.
Les paysages changent et on soupçonne qu'à mesure que notre planète se réchauffe, les bactéries productrices de méthane deviennent plus actives. Ce qui ne ferait qu'accélérer le réchauffement car le méthane est un puissant gaz à effet de serre.
Alors que devons-nous faire ? "Le mieux que nous puissions faire, c'est de prévenir les émissions d'origine humaine car cela aura un double effet : cela réduira en partie les émissions humaines, mais aussi les futures émissions naturelles," assure David Bastviken.
Author: Hailey Hahn
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